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Tique géante Hyalomma marginatum, mâle et femelle
Reichlen.net © Lidia Chitimia-Dobler – Université de Hohenheim – Institut de microbiologie de la Bundeswehr

A l’échelle des tiques, c’est un monstre! 

Une tique géante, Hyalomma marginatum*, qui peut atteindre 2 cm de long lorsque gorgée de sang, est en train de se propager dans toute l’Europe. Vecteur notamment de la Fièvre Crimée-Congo, hémorragique et mortelle jusqu’à 40% des cas, cette tique tropicale géante vit dans le sol. Elle peut repérer sa proie à 9 mètre de distance. Mais aussi, elle va la suivre, et peut lui courir après pendant bien 10 minutes, sur une distance de 100 mètres. Une fois agrippée à sa victime, par son rostre enfoncé dans l’épiderme, elle peut sucer son sang durant 30 jours.

Plus rarement, dans environ 30% des cas tout de même, la fièvre hémorragique Crimée-Congo pourra se transmettre par le contact avec du sang et autres fluides corporels issus d’un animal voire d’un humain infecté. Dans le cas d’animaux infectés, le risque peut être important pour les personnels des abattoirs, pour autant que s’y trouvent des animaux infectés. Quant à la période d’incubation de la maladie, elle oscille entre 2 et 14 jours.

Très présente en Afrique et en Asie, ainsi que dans les Balkans et au Proche-Orient, elle a été découverte en 1975 en Europe par une équipe de chercheurs suisses de l’Université de Neuchâtel. Avec le réchauffement climatique que connait le monde, et par conséquent le contient européen, on la retrouve désormais un peu partout; jusqu’en Allemagne, aux Pays-Bas, et même en Suède!

Mais elle peut aussi très bien, et même facilement, migrer jusque dans les DOM-TOM-COM; si ce n’est pas déjà le cas! Elle peut notamment se trouver déjà dans les Antilles françaises et la Réunion, en étant venue dans les bagages de voyageurs, mais aussi avec les déménagements et autres importations de marchandises.

Qu’est-ce que la fièvre hémorragique Crimée-Congo?

La fièvre Crimée-Congo (FHCC) est de type « fièvre hémorragique virale », un groupe de maladie qui touche de nombreux organes du corps, endommagent les vaisseaux sanguins, et peuvent provoquer des saignements, hémorragiques. Le cerveau n’en est pas exempté. Dans le même groupe de maladie, on retrouve la Dengue, mais également l’Ébola, bien plus dangereuse.

Les symptômes de la fièvre hémorragique Crimée-Congo

Les symptômes sont une asthénie ou fatigue qui peut être profonde, une fièvre soudaine et forte, une sudation excessive, des frissons, et des troubles digestifs. Symptômes qui peuvent déjà se faire confondre à d’autres pathologies, bien moins graves; quoique. Puis viennent des céphalées ou maux de têtes, une arthralgie, ou douleurs articulaires, une myalgie, douleurs musculaires, des nausées, et des vomissements.

Dans les 3 à 4 jours qui suivent l’infection peuvent survenir de larges hématémèses, ou vomissement de sang,  suivies de méléna, ou sang noir qui s’évacue par l’anus. Puis se sera des épistaxis, saignements à caractère hémorragique par le nez, ou fosses nasales, une hématurie, ou sang dans les urines; ainsi que, pour les femmes, des saignements vaginaux.

De même, de larges hématomes, et ecchymoses, apparaitront au niveau des points de ponction*; qui commenceront par une éruption cutanée pétéchiale ou purpurique, provoquée par un saignement au niveau de la peau et des muqueuses.

Il peut y avoir aussi une accélération de la fréquence cardiaque, ou à contrario une bradycardie, une désorientation temporo-spatiale, avec une perte des repères spatiaux et du temps, ainsi qu’une hypertrophie des ganglions lymphatiques. Sans parler de la thrombocytopénie, diminution drastique du nombre de plaquettes sanguines, et de la leucopénie, baisse des leucocytes totaux ou globules blancs.

Un maladie potentiellement mortelle

Le taux de mortalité de cette maladie se situe, selon l’OMS, entre 10% et 40%. En comparaison, le taux de mortalité de l’Ébola, tel qu’observé lors des précédentes épidémies, serait selon la même source entre 25 et 90%. Quant à la Dengue, qui comprend 4 sérotypes, il y aurait un taux de mortalité de 20%, mais seulement sur 1% des cas de maladie avérés.

Le traitement de la Crimée-Congo, ou FHCC

Il n’existe pas pour l’instant de traitement spécifique de la fièvre hémorragique Crimée-Congo. Et s’il s’agit d’enfant, c’est une urgence pédiatrique absolue. Cela –dit, la prise en en charge médicale reposera essentiellement sur un traitement symptomatique de soutien à visée générale.

Le saviez-vous?! Reichlen.netEn cas de doute, comme pour une Dengue sévère, ou hémorragique, qui est transmise elle par un moustique, aèdes aegyti, il est vivement recommandé de consulter son médecin traitant dans les meilleurs délais! Et au besoin lui dire si l’on a repéré une tique sur soi ou tombée sur le sol; voire que l’on revient d’une zone potentiellement infestée.


Tique géante Hyalomma marginatum: sa répartition en Europe (jan.-2019)
Reichlen.net © ECDC-EFSA


Tique géante Hyalomma marginatum dans un bain d’alcool
Reichlen.net © Adam-Cuerden

Comment éviter les morsures de tique?

En Europe et au Québec, plus largement au Canada, les beaux jours appellent à sortir, à aller se promener dans la nature. Alors qu’en Guadeloupe, on peut le faire en toutes saisons.

C’est d’ailleurs excellent pour sa santé, notamment pour son cerveau. En effet, le contact avec la nature impacte déjà très directement, et rapidement, sur nos fonctions cognitives; et en améliorent les fonctionnements.

Mais nous sommes aussi dans un monde de parfaite dualité! Et si la nature, dans toute sa biodiversité, est essentielle à la vie humaine, elle comporte également certains risques. Les tiques, nécessaires à l’équilibre, comme les moustiques, et tous les insectes, en font partie.

On connait très bien le problème du développement de la maladie de Lyme, ou Borréliose de Lyme, maladie infectieuse, elle aussi transmise par une tique, et dont le développement exponentiel est aussi due en partie au réchauffement climatique.

On « découvre » désormais le danger sanitaire que représente la tique géante Hyalomma marginatum en Europe, car elle était jusqu’alors essentiellement cantonnée au-dessus du 50ème parallèle, dans l’hémisphère Sud. .

Alors, peut-on éviter ces tiques? Et surtout de se faire mordre par elles?

7 conseils de bon sens pour éviter d’être mordu par une tique

1. Bien choisir ses vêtements

Les vêtements doivent être couvrant et amples, si possible en textile naturelle (coton, lin…), et de couleur clair; ce qui est aussi conseillé quant aux moustiques.

Comme la tique attaque en particulier au niveau des jambes, pour ensuite migrer vers le haut, et aller se loger de préférence dans les zones humides, tels que les plis de la peau, il est utile de fermer la base du pantalon (cordon, élastique, dans les chaussettes ou les bottes, etc.)

2. Utiliser des chaussures fermées

Certes, lorsqu’il fait chaud, l’envie est de porter des sandales ou des tongues. Mais si vous allez dans des zones de « savane », ou herbes hautes, et de forêt, privilégiez des chaussures fermées. Elles peuvent être en toile, avec des propriétés aérantes, mais elles doivent être fermées!

3. Utiliser un répulsif cutané

Pensez-y! Les répulsifs cutanés anti-moustiques, et désormais anti-tiques, semblent assez bien fonctionner pour certains d’entre eux. Mais choisissez-les biens: il faut qu’ils soient efficaces, sans pour autant nuire à votre santé!

Attention aussi aux femmes enceintes et aux enfants, en particulier les plus petits: outre les molécules vaporisées dans l’air, et qu’ils peuvent respirer, le produit peut pénétrer dans une certaine mesure à travers la peau, ou épiderme. Et par le transport sanguin, se répandre dans le corps. Attention notamment au DEET, qui peut s’avérer très toxique.

Alors certes, il en existe également composés d’essences naturelles. Mais encore faut-il que celles-ci soient en concentration suffisante, et stables. Aussi, pulvérisez cet anti-tique, ou anti-moustique, sur vos vêtements, vos chaussures, ainsi que les partie découvertes de votre corps; tels que les bras, le cou. Attention à ne pas en mettre sur le visage!

4. Utiliser éventuellement un répulsif spécifique pour textiles

Très utiles, voire efficaces jusqu’à six semaines, ils sont cependant très toxiques pour l’humain; mais aussi pour le chat. Contenant en général de la perméthrine, une pyréthrine de synthèse que l’on retrouve également dans certains insecticides, mais aussi dans certaines « spirales anti-moustiques », elle est dans le « Top 2 » des causes d’intoxication mortelle du chat.

L’Anses, agence nationale française de sécurité sanitaire et alimentaire, conseille d’ailleurs à tous les propriétaires de chats de ne pas utiliser de produits vétérinaires qui en contiennent*. Car bizarrement certains fabricants mettent de la perméthrine dans les antiparasitaires, alors qu’ils savent qu’elle est mortelle pour les chats! Cherchez l’erreur…

Ces répulsifs ont en outre les mêmes contre-indications que ceux cutanés, notamment pour les enfants en bas âge et les femmes enceintes.

5. Éviter autant que faire se peut les broussailles et autres maquis

Les tiques adorent les endroits chauds et humides, mais abrités. Et si la tique géante Hyalomma marginatum se trouve elle dans le sol, les autres se planquent dans les broussailles, et attendent gentiment qu’une proie potentielle passe non loin d’elles.

De même, si vous vous allongez sur le sol, faites-le sur un lit de camp, voire une couverture ou une natte. Vous pouvez également, et facilement, rajouter dessous une couverture dite de survie: peu coûteuse et très légère, elle vous isolera aussi de l’humidité du sol.

Tout un chacun devrait d’ailleurs en avoir dans sa voiture, et bien sûr, dans son sac de promenade; au même titre que de l’eau, et une petite trousse de premiers secours, adaptée au lieu de pérégrination.

6. S’inspecter soigneusement après une promenade ou randonnée

C’est essentiel de le faire! Les grands singes en ont la sagesse. Pourquoi pas les humains?! En particulier si l’on s’est promené dans des sous-bois ou dans une « savane », autre que la place centrale de Fort-de-France, et à une altitude inférieure à désormais 2000 m.

En effet, si auparavant on parlait de 1000 m d’altitude, avec le réchauffement climatique, qui pose d’ailleurs de graves problèmes en montagne, les tiques montent bien plus haut! Imaginez simplement qu’à 1400 m, dans les Alpes notamment, des températures jusqu’à 15° ont été relevées. Ce qui veut aussi une fonte dramatique du permafrost, une glace parfois plus que millénaire, qui sert de « ciment » aux rochers. D’où certaines zones devenues désormais impraticables en été, en raison des risques d’éboulement.

Cela-dit, n’hésitez pas à vous inspecter mutuellement, en couple, en famille, entre enfants; quitte à le faire comme un jeu: ce doit être de préférence un moment ludique, et de franche rigolade! Attention au besoin de pudeur des adolescentes et adolescents, en raison de leur « mue »: dans certains cas, cela peut être vécu par eux comme un véritable traumatisme.

7. Et si l’on trouve une tique sur soi, que faire?

Il est important de la retirer au plus vite, mais pas n’importe comment! En effet, son rostre peut rester bloquée dans la peau, et créer selon le type de tique une infection, ou une surinfection. Il existe une pince spécifique, que l’on devrait trouver dans toutes les bonnes pharmacies, mais aussi chez votre vétérinaire préféré; enfin celui de votre animal de compagnie s’entend. Elle ne coûte que quelques centimes, voire un peu plus pour les plus élaborées.

Dans tous les cas, il faut impérativement tourner délicatement la tête de la tique, comme si vous la dévissiez. Vous pouvez aussi si vous le désirez, et s’il y a plaie, désinfecté la zone. Puis la garder éventuellement dans un petit bocal hermétique, où elle baignera dans de l’alcool. Cela vous permettra de pouvoir la monter à votre médecin ou à votre pharmacien; voire au vétérinaire de votre animal de compagnie, ou le plus proche: ils sont souvent mieux à même, sauf exceptions notables, de déterminer le genre du tique. Vu que tout le monde n’est pas entomologiste dans l’âme…

Et en cas d’apparition de symptômes, ou d’un doute, n’hésitez pas à aller rapidement consulter votre médecin traitant. Vous pouvez également appeler un service d’urgence médicale, qui devrait être à même de vous conseiller; et au besoin, d’organiser une prise en charge médicale. Cela est d’autant plus important pour toute personne fragilisée, notamment les enfants, les personnes âgées, et les immunodéficientes; ainsi que pour toutes celles et tous ceux qui résident ou reviennent d’une zone potentiellement à risque.

Ces recommandations sont également valables pour les animaux. D’autant plus qu’il peut y avoir des pathologies spécifiques, comme l’Ehrlichiose, maladie canine potentiellement très grave, que l’on retrouve entre autre sur le passage et à proximité des bovins (non-traités).

Informations complémentaires

Pour plus d’informations, quelques liens:

Installation de la tique géante Hyalomma marginatum: https://be.anses.fr/sites/default/files/O-005_2018-07-23_Hyalomna-Stachurski_VF.pdf (FR-EN). Dans ce bulletin épidémiologique de l’Anses, ils y donnent quelques informations quant à l’installation de cette tique en France continentale. Pour la Guadeloupe? Pa save…

Tique géante Hyalomma marginatum (CDC européen): https://ecdc.europa.eu/en/search?s=Hyalomma+marginatum (EN)

Tactique… anti-tiques en France (mais date un peu…): http://www.inra.fr/Chercheurs-etudiants/Biologie-animale/Tous-les-dossiers/Tactiques-anti-tiques/Une-nouvelle-espece-de-tique-dans-le-Sud-de-la-France (FR)

Fièvre hémorragique Crimée-Congo (OMS): https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/crimean-congo-haemorrhagic-fever (FR).

Fièvre hémorragique Crimée-Congo (CDC états-unien, une référence!): https://www.cdc.gov/vhf/crimean-congo/index.html (EN)

Fièvre hémorragique Crimée-Congo (pour les professionnels de santé): https://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?lng=FR&Expert=99827 (FR-RU)

Dengue sévère, ou hémorragique: https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/dengue-and-severe-dengue (FR)

Borréliose de Lyme: L’ARS de Guadeloupe semble ne pas aborder le sujet. Quant à l’Institut, il le fait sur Facebook; ce qui n’est déjà pas si mal, car présente ici. Par conséquent, le lien d’une autre ARS, celle d’Occitanie (région que j’affectionne): http://www.occitanie.ars.sante.fr/tiques-et-maladie-de-lyme (FR). Ou carrément le Centre de référence de la Borrelia à Strasbourgs, en France: http://www.chru-strasbourg.fr/Les-centres-de-reference/Borrelia (FR).

– Les tiques en général, sur le sympathique site « Les petits baroudeurs »: https://www.lespetitsbaroudeurs.com/blog/comment-se-proteger-des-tiques-randonnee/ (FR). Il comporte des conseils pratiques et utiles, et donne un visuel de la pince « tire-tique ».

Les tiques, parmi d’autres thèmes ayant trait au développement: https://www.cirad.fr/ (FR)

CDC européen: https://ecdc.europa.eu/en/search?s=Hyalomma+marginatum (EN)

Si vous avez connaissances d’autres ressources sérieuses, dont les informations sont validées, merci de les partager. Vous pouvez également me contacter.


* Notes:

– La tique géante Hyalomma marginatum est une espèce de tiques de la famille des Ixodidae. Appelées couramment tiques, elles sont en fait, dans la classification scientifique, un ordre d’arachnides acariens; arachnide car elles ont 8 pattes, comme les araignées. Ordre qui a été décrit par William Elford Leach (1790-1836), zoologiste britannique, en 1815. Il regroupait en 2010 quelques 896 espèces, classées en trois familles; dont 41 en France, parmi lesquelles 4 sont très occasionnelles. [Claudine Pérez-Eid, « Les tiques : identification, biologie, importance médicale et vétérinaire » (Coll. Monographies de microbiologie), Lavoisier, 2007].
– Source: CHU de Rouen (Orphanet)
– L’ANSES le dit: « Pas de perméthrine pour les chats ». Lire ses explications et recommandations sur son site, https://www.anses.fr/fr/content/pas-de-perm%C3%A9thrine-pour-les-chats

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